Pour parler aujourd’hui d’aujourd’hui…
Si « les contraires s’attirent », « qui se ressemble s’assemble ». Entre ces deux maximes populaires, pour contourner la problématique d’un face-à-face normé ou fermé sur lui-même, et pour parler aujourd’hui d’aujourd’hui, quatre artistes interprètes -deux hommes et deux femmes- participent du processus de création, l’enrichissant de leurs audaces comme de leurs pudeurs. Au terme, chacune des deux partitions est incorporée parl’ensemble des artistes, ouvrant àplusieurs assemblages possibles.
Ainsi, VERSUS se propose comme un déroulé chorégraphique à corps substituables.L’approche est donc froide, pour amener à la définition de figures sur lesquelles peuventse projeter des imaginaires infinis.
L’exploration s’intéresse aux états de corps plutôt qu’à une narration. Que traduire, par laforme, des sentiments d’approche, d’abandon, de fougue, de consumation, de langueur,d’ambiguïté ou d’évidence, mais aussi de refus, de rejet, de violence, d’emprise ou dejalousie, qui puisse nourrir de substance une composition de l’ébranlement amoureux ?
Articulé autour d’éléments dramaturgiques lisibles, le travail gestuel, abordé à partir de sollicitations, génère l’écriture de formes parfois différentes explorées par l’étude formelle de mêmes états : de cette façon, les duos possibles peuvent apparaitre en même temps similaires et distincts, où quatre êtres singuliers délivrent autrement de mêmes complexités.
Amour continu versus partenaire alternatif,imaginaire versus représentation…
Les artistes, occupants successifs d’un espace exigu, se découvrent, et se découvrent deprès.
L’action de VERSUS se situe dans un espace cosy clos, peut-être une chambre d’hôtel,dont les murs (les yeux) voient se renouveler en permanence, tel un flux éternel, uneséquence amoureuse. Les quatre artistes se succèdent dans un continuum. Dans la proximité qu’offre le dispositif, la forme stylisée sollicite en chacun·e son propre imaginaire galant, interroge son goût, sa relation au charnel.
Au fil de la pièce, les artistes s’interpellent : Claude, Maxime, Dominique, Charlie, Camille… Les prénoms mixtes marquent le réel d’ambiguïté, offrent une première possibilité de glissade, comme une invitation à reconnaître qu’il faut juste accepter d’une personne son nom, et à la suite, ce qu’elle est. La pièce s’écoule alors que changent les partenaires d’émoi, chacun·e figurant pour chaque autre un mirage plutôt qu’une réalité. Le protagoniste principal est le désir, son avènement, sa chute, quand les couples renouvelés de danseurs et danseuses en multiplient de possibles représentations.
Le compositeur Angelos Liaros Copola retrouve Michel Kelemenis, pour la quatrième fois, derrière le projet de créer un moment suspendu arraché à l’écoulement du temps, et d’échauffer cet espace d’intimité partagée. Dans la langueur des sonorités electro se glisse du hors champ. Dans le hors champ s’immisce le trouble…